Il paraît que j'ai des tas de défaut. On dit que je suis superficielle, égoïste. Manipulatrice sur les bords également. Et on me prête également d'autres traits de caractère dans ce genre. Mais pour être honnête, je m'en fiche. Tant que je suis sous les feux des projecteurs. Tant que tous les regards sont tournés vers moi. Le reste m'importe peu. Je veux être la fille que tous les garçons suivent du regard lorsqu'elle passe dans la rue. Et pour cela, je suis prête à faire n'importe quoi.
J'étais fille unique. Un psychologue vous dira sans doute que c'est cela qui a influencé mon comportement, que c'est pour ça que j'aime tant être le centre d'attention. Et bien oui, j'étais une enfant « pourrie gâtée », comme on dit. Dès que je claquais des doigts, on m'amenait ce dont je rêvais. Un père honnête qui travaillait dans une grosse entreprise en tant que fonctionnaire, une mère qui passait ses journées à la maison, à me cajoler. Aucun problème spécial au niveau de la famille - ce qui est plutôt rare de nos jours, je vous l'accorde. La mienne, pourtant, était comme cela. Ou alors, ils cachaient bien leur jeux - car j'ai soupçonné maman de s'envoyer en l'air avec le jardinier, dès l'instant où j'ai su ce que cela signifiait.
Mon entrée à l'école primaire. Il y avait cette fille, avec quelques kilos en plus. Artémis-Cassandre qu'elle s'appelait. Pour moi, c'était Arté - son prénom était bien trop long ! Arté, ce fut la première personne à laquelle j'avais parlé. Ma première amie. Lorsque l'on s'est connues, c'était ça. On passait tout notre temps ensemble, que ce soit en cours où en dehors.
« Maman a dit que tu pouvais venir dormir à la maison ce week-end. » Artémis m'avait adressé un petit sourire avant de me remercier. On avait passé notre week-end ensemble. Mon premier week-end entre copines. Dieu que j'étais idiote à l'époque. Idiote et naïve. Rien à voir avec celle que je suis aujourd'hui. Il y eut une époque où Artémis fut vraiment une amie. La meilleure, celle que j'aimais plus que moi-même. Mais vous savez, tout n'est pas toujours comme cela. Les gens changent. Et moi en premier. Quelques années plus tard, j'étais totalement métamorphosée.
C'est à l'adolescence que la Desdemone que je suis aujourd'hui est née. J'étais comme la majeure partie des ados ; je profitais à fond de la vie. J'étais devenue ce que l'on appelle une jeune fille populaire. Dans la rue, on se retournait sur mon passage, on me sifflait. Les garçons se précipitaient à mes pieds. Et ce serait mentir que de vous dire que cela ne me plaisait pas. J'adorais cette sensation.
Rapidement, l'alcool, la cigarette et la drogue n'eurent aucun secret pour moi. J'étais invitée à toutes les fêtes uppées de la ville et on espérait toujours m'y voir. J'y allais toujours avec Artémis, que je n'avais pas quittée depuis l'époque. Parfois, Lust - son cousin - et Ycare - un ami - se joignaient à nous. À cette époque cependant, mes rapports avec Arté avaient déjà bien changé. A mes yeux, elle n'était plus la petite fille adorable qu'elle était auparavant, celle dont je ne pouvais me passer. Elle était cette adolescente, mal dans sa peau avec ses kilos en trop, qui me permettait de me mettre en valeur. Il y a pas photo : à côté d'elle, je semblais encore plus jolie que je ne l'étais en réalité. On venait toujours m'aborder moi, jamais elle. Je me sentais bien. J'étais mieux que cette fille, je lui étais supérieure. Et j'aimais ce sentiment. Arté, ce n'était pas vraiment mon amie, malgré les apparences. Pour moi, elle n'était qu'un instrument.
« Il est pas mal, Ycare. » J'arquais un sourcil sans lever les yeux du magasine que je lisais :
« J'ai déjà connu mieux. » Ou comment dissimulé l'attirance qu'on ressent pour un garçon. Car oui, je devais avouer qu'Ycare était vraiment pas mal. Mais pas question que je le lui dise.
« Tu sais, Dess'... Je crois que je suis tombée amoureuse de lui. » C'était une blague ? Une grosse blague ? Artémis, amoureuse d'Ycare ? Aucune chance. Je ne connaissais pas Ycare plus que cela, mais je savais qu'Arté n'était pas son style de fille. Non. Il ne la verrait jamais comme une potentielle petite amie. Et c'était tant mieux. C'était exactement ce que j'attendais d'elle. Nous pouvions nous comportre comme si l'on était des meilleures amies, cela ne me gênait pas. Tant qu'elle me mettait en valeur. Tant qu'on me préférait à elle.
« Bordel, papa ! Prends le temps de te reposer et arrête de tourner comme une hélice ! » Il avait frôlé la mort ; les médecins avaient diagnostiqué un infarctus. Je n'étais pas à la maison lorsque cela s'était produit, mais j'étais venue à l'hôpital dès que je l'avais appris. Il ne pouvait pas mourir. Non, pas lui. Mon père, ça avait été mon super-héros durant plusieurs années lors de mon enfance. C'était celui qui m'avait donné envie d'aller en fac de médecine après le lycée, puisque ça avait été son rêve dans sa jeunesse, un rêve qu'il n'avait pu réaliser. Je tenais énormément à mon paternel. Bien plus qu'à la majorité des personnes. Alors le perdre, je ne supporterais pas. Ni lui, ni ma mère d'ailleurs. Mais cette fois, les Dieux ne furent pas de mon côté : papa rendit son dernier souffles quelques jours plus tard, faisant un nouvel infarctus...
~*~
Je quittai le lit, à la recherche de mes vêtements, éparpiés dans la pièce. Le garçon qui était dans le lit - je ne me souviens plus de son prénom - me regardait et tapota la place vide à côté de lui.
« Allez Dess', reviens par là... » Mais je ne l'écoutais pas. J'enfilais mes vêtements en vitesse. Et lorsque je fus prête, je m'approchais enfin de lui, prenant place sur le lit. Il essaya de m'embrasser, mais je posais mon doigt sur ses lèvres pour l'en empêcher :
« Sorry, honey, mais c'est moi qui dicte les règles du jeu. Je t'ai offert la nuit de ta vie, mais cela ne se reproduira plus. » Sur ses mots, je me levai et quittai l'appartement. Non, cela ne se reproduira plus. J'étais une de ces filles volages, libertines. Qui se lassait rapidement du même homme. Rarement plus d'une fois le même homme. Je ne recherchais que le plaisir, la satisfaction personnelle. Pas de relations sérieuses. Rien que des parties de jambes en l'air. Et ça me convenait. Les garçons avec lesquels je passais la nuit également. Ils avaient la chance d'avoir une fille comme moi dans le lit pour une nuit. Ils n'allaient tout de même pas se plaindre ?
Ycare était amoureux de moi depuis pas mal de temps. Je le trouvais très attirant. Donc, il était normal que l'on en vienne à s'embrasser un jour ou l'autre, n'est-ce pas ? Oui, sauf que ça ne plait pas à tout le monde. Artémis. Elle avait assisté malgré nous à la scène, lors d'une fête à laquelle on participait. La porte s'était ouverte, elle était apparue. J'avais pu voir dans son regard qu'elle était brisée. Déçue de mon comportement. Mais pour être honnête, cela ne m'atteignait que très peu. Desdemone, la meilleure amie d'Artémis, n'existait plus depuis longtemps. Elle avait fait place à Desdemone, celle qui s'occupait d'elle-même avant les autres. Celle qui n'agissait que dans son propre intérêt. Notre confrontation avait entendu le lendemain. Arté ne comprenait pas mes agissements. Elle me faisait confiance et je l'avais trahie, disait-elle. J'avais beau lui répéter que j'avais fait cela pour son bien, elle ne voulait pas m'écouter. Quelques jours plus tard, elle avait quitté Athens. Sans donner de ses nouvelles.
Pour moi, la vie avait suivit son cours. Presque comme si Arté n'avait jamais existé.
« Qu'est-ce que tu foutais ? » « Désolée, ma vieille avait besoin d'aide. » Je m'approchais d'Ycare pour y déposer un baiser sur ses lèvres. Aussi étonnant que cela puisse paraître, il est à ce jour ma plus longue relation; ça a tout de même duré plusieurs mois. Étonnant lorsque l'on me connaît. Avec lui, je crois que ça a toujours été différent. Nous avons été amis avant de sortir ensemble. Je crois que c'est pour cela. Cependant, on ne change pas si facilement ce que l'on est. Moi et mes besoins de libertés... Je suis volage, je me lasse rapidement des gens. Et Ycare et moi avons fini par nous éloigner l'un de l'autre - on n'a pas rompu officiellement, mais on ne se voyait plus. C'est de cette manière que tout s'est terminé entre nous.
« Des nouvelles d'Arté ? » « Non, pas depuis son départ. » Parfois, il m'arrivait de me demander ce qu'elle devenait. Au fond, je crois que j'ai ressentit un grand vide après son départ. Certes, durant les premiers temps rien ne changea, mais rapidement il me manquait celle avec laquelle je passais le plus clair de mon temps. Celle que j'avais un jour appelée « meilleure amie ». Je savais qu'Ycare et moi y étions pour beaucoup dans son départ. Une partie de moi s'en voulait, pour ce que j'avais fait. J'avais été égoïste. Comme toujours. Et Artémis en avait souffert. Parfois, je me disais que j'avais vraiment été une belle sal*pe avec elle.
~*~
Un après-midi, dans les rues d'Athens. Je me promenais avec un garçon qui était en cours avec moi, à l'université. Mignon, forcément. Nous parlions de nos cours, lorsqu'il se retourna sur le passage d'une fille. Je pinçais les lèvres et lui donna un coup de coude :
« Soit discret, surtout. » Mon regard tomba ensuite sur lab brunette qui venait de passer à côté de nous, celle qu'il avait regardé. De dos, elle me disait quelque chose. Du moins, j'avais l'impression de reconnaître sa chevelure. Mais où pouvais-je déjà l'avoir vu ? Soudain, elle se retourna et je vis son visage. Je retins mon souffle. Elle lui ressemblait presque trait pour trait. Avec quelques années en plus. Et quelques kilos en moins surtout. Son sosie ? Non, c'était bien elle. Artémis-Cassandre Adamson était de retour à Athens. Et elle s'était transformée en bombe sexuelle. Vous savez quoi ? Je n'arrive plus à regretter ce que je lui ai fait il y a quelques années. Avec un physique pareil, elle n'aura plus aucun problème. Et ça, ça craint.