« Saskia tu rentre pas trop tard ce soir, d’accord ? ». Une nouvelle fois j'acquisse rapidement d'un signe de tête. J'ai quatorze ans et il faut avouer qu'à cette époque mes parents me prenaient un peu la tête. J'étais en pleine période d'adolescence et je m'intéressais beaucoup plus aux filles et au basket qu'aux recommandations que ma mère pouvait bien me faire. Sauf que ce soir, j'aurais du réellement faire attention à ce qu'elle me disait. J'aurais dû lui répondre gentiment comme un fils doit logiquement le faire. Sauf que je ne l'ai pas fait parce que comme d'habitude je n'avais qu'une envie c'était de rejoindre mes meilleurs amis ! En y repensant je ne cesse de m'en vouloir... Mais en même temps qui aurait pu savoir que ce soir-là les choses allaient mal tourner pour mes parents. Comment quelqu'un aurait pu savoir qu'ils allaient se faire couper la route par un dingue qui avait beaucoup trop bu ! Qui aurait pu prévoir que ce soir-là était le dernier soir où je verrais mes parents ? Je n'avais que quatorze ans et ce soir de décembre en rentrant chez moi j'ai trouvé les policiers à la place de mes parents. Je ne me souviens pas réellement des jours qui ont suivi cette annonce. Je vivais dans un brouillard permanent. Je me souviens juste que les gens me prennent tous en pitié. On a voulu me placer dans une famille d'accueil. Je ne pouvais même pas décider d'où je pourrais bien aller. Heureusement ma grand-mère à débarquer a Baltimore. Elle est officiellement le seul parent qui me reste et dieu merci c'est une femme formidable. C'est comme cela qu'en quelques semaines j'ai totalement abandonné mon ancienne vie. Adieu Baltimore, adieu mes parents, adieu les amis et surtout adieu le gentil petit Saskia qui ne connaissait rien de la vie...

C'est comme cela que j'ai débarqué à Athens. Je ne connaissais rien ici, après tout je n'avais jamais quitté mon Etat avant toute cette histoire. Ici j'ai carrément essayé de changer de vie. Personne ne sait ce qui est arrivé à mes parents, je ne veux pas qu'on est pitié de moi parce que j'ai perdu mes parents. Je ne parle pas d'eux et pourtant ils me manquent un peu plus chaque jour. A quatorze ans on ne devrait pas avoir à apprendre à vivre sans nos parents. La vie en a décidé autrement pour moi. Malgré tout, j'ai l'impression qu'ici je pourrais réellement redémarrer à zéro. Au Lycée, tout le monde est sympa avec moi-même si je suis un nouveau. En fait, ils s'en fichent carrément de savoir d'où je viens. Pour eux, je suis sympa, plutôt mignon d'après les filles et je joue bien au basket alors ça leurs suffit amplement. A force je me fais de nouveaux amis. Je réapprends à vivre même si je reste assez souvent seul dans mon coin. J'ai besoin de mes moments de solitude pour penser à mes parents.
Et puis il y a eu Roxane. Roxane c'est la jeune fille qui vit juste à côté de chez ma grand-mère. Elle est donc ma voisine. J'ai tout de suite craquer en la voyant. Elle possède un charme absolu et quelque chose qui m'a rapidement fait comprendre qu'elle n'est pas comme les autres. J'avoue être tombé sous son charme dès les premiers temps. Au début, on se voyait juste le matin pour se rendre au Lycée et puis à force de discuter on sait trouver un tas de points communs qui font qu'elle est très vite devenue ma meilleure amie. J'appréciais aussi son frère jumeau Ennio. Même si j'ai toujours eu un peu de mal à le cerner. Finalement ici je pouvais vivre en oubliant durant quelques heures la tragédie qui avait marqué ma vie. Malgré tout mon caractère et ma façon de vivre ont été totalement changer par cet accident. Maintenant j'ai peur de m'attacher aux gens... Je suis également incapable de conduire une voiture. Cela réveille en moi mes vieux démons ceux qui font de moi un petit garçon apeuré. Je vis avec mon chagrin. Heureusement ma grand-mère est toujours là pour moi. C'est une femme extraordinaire qui en a beaucoup bavé dans la vie et c'est grâce à elle que je suis devenu ce que je suis aujourd'hui. Je lui dois beaucoup. Je lui dois tout en réalité.

« C'est fou. Choisir l'inaccessible quand on peut avoir l'accessible. ». Oui les choses ont bien changé entre Roxane et moi. L'adolescence est passé et pourtant le béguin des premiers jour est de plus en plus présent. Je n'arrive pas à me défaire de cette sensation. Sauf qu'aujourd'hui les choses ont bien changé ! Sur ces fameuses paroles j'ai claqué la porte de chez elle. Je sens mes muscles se contracter, mon coeur bat à sans à l'heure dans mes tempes, j'ai comme l'impression que le monde va s'écrouler autour de moi. Amoureuse. Elle est amoureuse. Enfin cette nouvelle devrait me réjouir, c'est sûr, mais... Elle est amoureuse de son frère. Ennio. Je l'ai toujours détesté, mais là je n'ai qu'une envie c'est de lui pourrir la vie. Et puis comment peut-on tomber amoureuse de son propre frère jumeau ? J'avoue être complètement perdu. Malgré tout je traverse le jardin pour rentrer chez moi. Je ne veux surtout pas qu'elle me rattrape. Arriver chez moi je prends une longue respiration. Mon dieu j'étais à deux doigts de la frapper. Je suis plutôt impulsif, mais à elle je ne peux pas lui faire de mal. Quoiqu'elle puisse bien me dire. Ces paroles tournent dans ma tête. Je ne me sens vraiment pas bien. J'ai le coeur qui va exploser. C'est bien la première fois que l'on s'engueule comme cela. Ou tout du moins que je mets en colère comme cela contre elle, mais je ne savais pas comment faire. Amoureuse de son frère. Elle aurait pu m'arracher le coeur et le piétiner que la sensation aurait été la même. Je sais que je ne suis pas censé avoir de tel sentiment pour elle. Après tout elle est ma meilleure amie... Mais je n'ai jamais réussi à changer les choses. Je ne m'attendais pas non plus à quelque chose, mais cette annonce était sans doute celle de trop. Je ne veux plus la voir. Je ne veux plus l'entendre parler ou encore rire. Bam ! Mon poing viens de s'abattre contre le mur. J'ai envie de réduire Ennio en miettes. L'inceste n'est-il pas puni par la loi ? Trahison. Haine et confusion ce mélange en moi. Aujourd'hui on a ruiné ma vie...

Cela fait désormais plusieurs jours et j'évite soigneusement de poser mes yeux sur la maison des De Valhèze. Ma meilleure amie me manque et il est clair que je ne vais pas bien, mais je ne peux pas me résoudre à aller la voir pour lui parler. Ma grand-mère ce fait du soucis pour moi. Je sors pour lui faire plaisir et pour lui montrer qu'elle n'a pas à s'inquiéter. Et pourtant... Il y aurait de quoi se faire du soucis des fois.