CHAPITRE I -

« Oh Mickey
You're so fine
You're so fine
You blow my mind »

« - AHAHAHAH »

Les rires de cette femme résonnaient dans toute la maternité. Ils étaient tellement forts qu’ils arrivaient à réveiller les patientes à l’autre bout de l’hôpital. Mais, elle s’en fichait. Elle riait, elle riait aux éclats, des larmes glissant de son regard azur. Elle ne pouvait s’arrêter et elle en arrivait même à ressentir une douleur profonde au ventre. Mais, impossible de se stopper. Non, c’était bien trop drôle d’après elle pour que ça mérite un effort et qu’elle s’arrête. Une infirmière entra en urgence dans la chambre de cette fameuse femme, toute perdue. Quelque chose n’allait pas ? Pourquoi cette femme riait-elle aussi fort ? Tout le service de l’hôpital, du moins de la maternité, était aux abois, derrière la porte de la chambre.

« - Madame Young, qu’est-ce qu’il se passe ? Est-ce que ça va ?!? »

La jeune infirmière ne savait ce qu’il se passait et avait peur, très peur ça se lisait sur les jeunes traits de son visage. Elle avait fini ses études quelques mois auparavant et cette madame Young était l’une de ses premières patientes. Cette dernière ria alors encore plus fort provoquant un sursaut chez notre jeune infirmière à la blouse rose. Cette dernière était encore plus perdu et enfin, la patiente tenta de se calmer, ne pouvant tout de même s’empêcher de rire par-ci, par là. Elle souffla alors, essuyant son regard plein de larmes et tenta de s’exprimer.

« - Il…. Il… Il… ress… ressemble à….à… UNE SOURIS AHAHAH… »

Et elle repartit dans sa partie de rire, toujours aussi bruyante. L’infirmière ne comprenait pas jusqu’au moment où son regard clair se posa sur le nourrisson qui pleurait non loin de sa mère, dans son berceau. Un instant, elle ne comprit pas vraiment, avant de s’approcher de l’enfant et de le prendre dans ses bras pour le calmer tandis que sa propre mère n’en avait rien à faire, toujours en train de rire. Elle ne comprenait pas la réaction de cette mère, cet enfant était tout à fait normal, même plutôt mignon avec ses grands yeux bleus qui la scrutaient avec émerveillement.

« - Vous lui avez trouvé un prénom alors ? »

Elle était désormais plutôt froide. Ça ne la faisait pas du tout rire. Cette femme avait mis au monde son enfant quelques heures plus tôt et à peine l’avait-elle vu qu’elle avait rigolé. Pauvre gosse, se disait l’infirmière. Et elle n’avait pas tort. Déjà, lorsqu’elle avait vu monsieur et madame Young entrer dans le hall de l’hôpital, elle avait compris qu’ils n’étaient franchement pas « normaux ». Monsieur Young ne marchait pas droit et sa femme riait, elle riait tout le temps de toute façon. Elle se doutait bien qu’ils n’étaient pas franchement très cleans, mais ici, ils étaient dans une maternité pas dans un centre de désintoxication, elle n’avait aucun moyen pour savoir si ce qu’elle avançait était vrai ou non et étant nouvelle dans le service, elle ne voulait pas prendre le risque de se tromper et de perdre sa crédibilité naissante au sein du personnel de l’hôpital.

« - Oui… ça sera…. MICKEY ! »

Mickey ? L’infirmière fit de gros yeux tout en posant son regard protecteur sur le bébé. Mickey ? La mère partit une fois de plus dans une partie de rire qui ne s’arrêta pas de si tôt. L’infirmière ne pouvait rien y faire et à l’intérieur d’elle-même, ça bouillonnait. Dommage que les lois avaient changé et que désormais tout parent pouvait donner le prénom de son choix à son enfant. Mickey… Etant donné que sa génitrice trouvait qu’il ressemblait à une souris ! Pauvre gosse, décidément…



CHAPITRE II -

« Sweet dreams are made of this
Who am I to disagree?
Travel the world and the seven seas
Everybody's looking for something »

« - Alors Mickey… On a quoi à manger aujourd’hui ? »

Le jeune garçon d’à peine sept ans soupira avant de se retourner pour se retrouver face aux trois brutes de l’école de trois ans ses aînés. Il savait pertinemment ce qui allait se passer, de toute façon, tous les jours c’était la même chose. Tous les jours, lorsqu’il sortait de classe, ces trois garçons venaient le voir et lui piquaient son gouter… enfin… quand ils étaient de bonne humeur. A dire vrai, dans le cas contraire, ils leur arrivaient même de lui faire manger de la terre ou des asticots. Le pauvre gamin était leur souffre douleur depuis qu’il était entré à l’école et étant donné sa petite carrure et son jeune âge, il n’avait pas d’autres choix que d’obéir. Il leur tendit son sachet dans lequel le bon gouter que sa sœur lui avait préparé gisait, espérant de tout son cœur et de toute son âme que ça s’arrête là pour aujourd’hui. A vrai dire, il ne comprenait pas trop pourquoi ces gosses étaient ainsi avec lui. Il ignorait que sa vie était « différente » et que ça se répercutait sur sa vie sociale à l’école. Il ignorait que d’avoir des parents hippies, c’était mal vu. Il ignorait que les autres, ils avaient la télévision chez eux. Il ignorait que normalement, une famille est composée d’un papa, d’une maman et des enfants. Il ignorait que ça n’était pas normal que des inconnus dorment dans son lit, des inconnus faisant partie de la même communauté hippie que ses parents. Pour lui, tout cela était normal. A l’école, il était seul, définitivement seul. Bien sûr, il y avait bien son seul et unique ami, le meilleur d’ailleurs, Clyde, les autres élèves le regardaient de travers. Ça jasait sur les Young ! Les parents transmettaient des idées mauvaises à propos des Young à leurs enfants qui ne voulaient être amis avec le pauvre petit Mickey. Et puis avec un prénom comme ça, beaucoup se moquaient de lui !

Celui qui semblait être le chef des trois brutes, s’empara du gouter et le sortit de son sachet. Il sourit en regardant ses copains en voyant le bon petit festin. Mickey avait faim, très faim, mais à ce moment-là, la peur prenait le dessus. Il était pétrifié devant ces trois gosses qui le dépassaient bien de trois têtes. Il avait sept ans, ils en avaient dix ! Que pouvait-il faire ? Il les regardait de ses grands yeux clairs, ses yeux innocents et naïf. Il voulait pleurer, mais il ne laisserait pas ses brutes avoir cette satisfaction là. Au fond de lui, il bouillonnait, il les détestait du fond du cœur, mais il était en infériorité dans tous les domaines. Le chef le regarda tout en mâchant bien salement dans le sandwich du garçon dont l’estomac criait famine, avant de lui faire des gros yeux faisant sursauter le gamin.

« - BAH QU’EST-CE QUE T’ATTENDS ? DÉGAGES !!! »

Il ne fallut pas beaucoup de temps au garçon pour déguerpir en courant et se retrouver à l’autre bout de la cours de récréation, non isolé pour être bien visible des maîtresses. D’après elles, Mickey était un gamin très gentil, mignon bien qu’un peu distrait et effacé. Il ne parlait pas beaucoup, n’avait pas beaucoup d’amis et semblait constamment dans la lune. Pour elles, cela était du à son caractère timide. Pas une seule seconde elles ne devinèrent que cette manière qu’il avait de se détacher du monde en se plongeant dans ses pensées étaient un moyen pour lui de s’évader et de survivre…



CHAPITRE III -

« I'll be the one that's stormin the castle
We'll be the two of hearts beating faster
'ever you want, 'ever you want, I'm down »

« - OH MON DIEU !!! Venez vite voir les enfants !!! Une crotte de lapin !! C’est RA-DIEU ! »

Mickey ne put s’empêcher de soupirer. Quelle idée avait-il eu de demander à ses parents se partir en colonie ? En effet, ça faisait des années qu’il réclamait de partir en vacances et cette année là, celle de ses sept ans, il avait eu satisfaction mais… ses parents l’avaient envoyé dans une colonie de vacances scout, dans le Colorado. Bon, il avait rien contre le crottin de brebis et la reproduction des kangourous mais tout de même, il était bien déçu et semblait être le seul à ne pas s’émerveiller devant une bouse de vache. Ça faisait deux semaines qu’ils parcouraient chaque jour la forêt et le gamin se faisait royalement chier, si je puis me permettre. Alors qu’il était le seul à ne pas observer la crotte de ce fameux lapin et à rester un peu à l’écart, il entendit un bruit, dans le buisson à sa droite. Curieux, beaucoup trop curieux, il s’avança doucement vers ce buisson avant de ressentir une pression sur son poignet droit et de se retrouver au sol, derrière ce même buisson. Il ouvrit de grands yeux reprenant peu à peu ses esprits lorsqu’il vit un visage familier se présenter à lui.

« - Clyde ? Qu’est-ce que tu fais là ? »

En effet, son ami, celui de son école était bel et bien présent. Il ne l’avait jamais vu au camp auparavant et était très content de le voir. Disons que la présence de Clyde permit au jeune garçon de ne pas s’ennuyer et puis, cela marqua leur amitié, pour de bon. Clyde devint alors son meilleur ami, la personne vers qui il pouvait se tourner en cas de problèmes. Clyde était un peu comme lui. Pas très populaire, incroyablement brillant, il passait son temps dans sa luxueuse chambre devant son écran d’ordinateur. Très riche, il fit découvrir au jeune Mickey la technologie. Une vraie révolution pour ce gamin qui n’avait même pas la télévision chez lui. Alors, les années passèrent et les deux garçon devinrent comme des frères, se soutenant durant les coups dur, notamment ceux que leurs réservaient les joueurs de football de leur école. Mickey devint un peu comme le frère de Clyde au point que les riches parents de ce dernier, pour un noël, alors que Mickey devait avoisiner les dix ans, ils lui offrirent un ordinateur portable. Véritable trésor pour le jeune Young qui le garda bien soigneusement et développa sa passion pour les jeux vidéos.



CHAPITRE IV -

« I had the life of ordinary, I spat it out
Now my condition's kind of scary, I need you now
Not love but I need something else »

« - Bon, les enfants, une nouvelle élève nous vient tout droit de New-York. Elle va arriver d‘ici quelques instants, je vous demande donc de l‘accueillir chaleureusement ! »

Une journée normale en soit, du moins c’est-ce qu’avait cru Mickey en se levant ce matin là. C’était un mardi matin, il s’en souvient parce que ce jour là marqua à jamais son existence. Mickey Elliot Young, neuf ans, mangea une pomme ce matin là. Il avait très mal dormi sur le vieux canapé, une bande de hippies, des amis à ses parents, ayant pris possession de son petit lit. Il s’était levé tôt et parmi la foule de gens endormis dans sa cuisine, il avait réussi à attraper une misérable pomme. Son sac sur le dos, il s’était rendu à l’école en skateboard. Il avait alors rejoint son meilleur ami Clyde dans l’enceinte de l’établissement, et comme chaque matin, les « populaires », les avaient embêté, les menaçant s’ils ne faisaient pas leurs devoirs. Les gamins peuvent parfois être très méchants et Mickey ainsi que Clyde n’avait pas vraiment les atouts nécessaires pour se défendre correctement. Ils étaient deux fantômes misérables et pathétiques contre la jeunesse dorée de l’Amérique. En classe, ils s’étaient installés côte à côté, devant, comme à leur habitude. Une nouvelle élève ? Quel était le problème ? Rien de spécial ? Pourtant dès que la gamine entra dans la classe, Mickey ne put détacher son regard clair de la silhouette parfaite de la petite fille. Naomie Peterson. Elle était l’être le plus radieux qu’il lui eut été permis de croisé. A partir de ce moment là, le jeune Young comprit ce qu’était l’amour, le vrai. Il nourrît alors au fur et à mesure des années une obsession certaine pour la demoiselle qui bien rapidement se fit des amis, les bourreaux de nos deux héros en question. Mickey l’aimait en secret, seul Clyde le savait et puis qui d’autre que son meilleur ami en avait quelque chose à faire ? Elle, pas une seule fois elle ne lui lança un regard, mais il s’en fichait, les simples faits de la voir s’amuser, sourire, se faire des amis étaient suffisants à son bonheur.



CHAPITRE V -

« It started out with a kiss
How did it end up like this
It was only a kiss, it was only a kiss »

« - Nooon Mickey, tu dois mettre un s à la deuxième personne… je sais que l’espagnol est très différent de l’anglais mais il faut que tu te mettes ça dans l’esprit ! Tiens, tu viendras me voir à la fin du cours ! »

Mickey acquiesça, tout content. Pourquoi était-il tout content que sa professeur le convoque dans son bureau après les cours ? Tout simplement parce que c’était voulu. En effet, il savait parfaitement qu’il fallait un s à la deuxième personne du singulier en espagnol, mais il avait fait exprès pour qu’elle le convoque. Pourquoi ? Parce que sa professeure était tout simplement… une bombe sexuelle. Bien sûr, il n’y avait que Naomie dans son cœur et son âme et pourtant, l’âge ingrat de l’adolescence lui donnait des idées pas forcément très fines. Il avait quinze ans, c’était un garçon à qui l’expérience avec les filles s’arrêtait au baiser et au tripotage de sein et rester plus de cinq minutes seul à seul avec sa professeure plus que sexy d’espagnol le rendait tout niais. Et puis, il avait bien remarqué les petits sourires qu’elle lui faisait et le fait qu’elle prenait toujours sa défense. Alors, il attendit patiemment que la cloche signalant la fin des cours sonne et se leva rangeant ses affaires dans son sac tandis que Clyde lui adressa une tape dans le dos pour lui souhaiter bon courage. A dire vrai, sa situation n’avait pas bien changé depuis l’école primaire. En effet, il était toujours ce geek, presque surdoué, accompagné de son fidèle meilleur ami, fou amoureux de la fille la plus belle de l’école et complètement transparent aux yeux de tout le monde. Bref, il n’adressa pas un regard à sa professeure avant que la salle ne soit complètement vide. Cette dernière ferma la porte et se retourna vers le jeune homme qui s’approcha son sac sur le dos, timidement.

« - Mickey… si je t’ai demandé de rester après les cours c’est pour qu’on prenne le temps de parler tous les deux ! »

Si ça ne tenait qu’à lui, ils ne feraient pas que parler. Il sentait des goutes de transpiration parcourir son corps, tandis qu’elle dégageait ses longs cheveux blonds de ses épaules dans un mouvement plus que sensuelle. Tout chez elle l’attirait, tellement qu’en cours, il ne parvenait à se concentrer et à réussir convenablement ses tests. Bien sûr, ça n’avait rien à voir avec ce qu’il pouvait éprouver pour Naomie, mais c’était déjà assez considérable. Il se stoppa alors devant le bureau de sa prof, qui était elle, assise dessus, ses longues jambes croisées posées juste devant lui. Elle était parfaite et cette jupe qu’elle portait faisait perdre toute notion de la réalité au jeune homme.

« - Tu es doué en espagnol et je trouve vraiment dommage que tu sois autant dans la lune durant mes cours… Il y a un problème avec ma méthode, tu n’aimes pas ma façon d’enseigner ? »

Mickey secoua légèrement la tête décollant son regard des immenses jambes de sa professeure. Il remit son sac en place sur son épaule et toussota ne sachant pas trop quoi dire. Il répartissait tours à tours son poids sur sa jambe droite, puis sur la gauche. Son rythme cardiaque était rapide, beaucoup trop rapide, il ne savait pas où se mettre.

« - Je ne te plais pas, c’est ça ? »

Son regard s’agrandit brusquement tandis qu’il plongea son regard clair dans celui de braise de sa professeure. Comment pouvait-elle ne pas plaire à quelqu’un ? Tous les élèves garçons de l’école étaient à ses pieds, toutes les filles en étaient jalouses, elle était d’une telle perfection qu’il ignorait comment deux être avaient pu en être les parents.

« - Nan, nan… vous… vous êtes parfaite…. Vous… je dois dire que… j’ai rarement vu une prof aussi cool que vous ! Non mais sérieusement… regardez-vous ! Vous êtes genre… parfaite quoi ! »

La jeune femme sembla tout d’abord surprise et un peu gênée tandis que le garçon ne savait pourquoi il avait dit ça, enfin… pourquoi il le savait, parce qu’il le pensait vraiment, mais ça n’était pas le genre de chose que l’on disait à sa prof d’espagnol ! Alors, elle sembla réfléchir, tandis que le jeune l’observait la peur au ventre. Elle regarda à droite, à gauche et alors, au plus grand étonnement du jeune homme, elle se jeta littéralement sur lui, capturant sa bouche sous un baiser puissant. Tellement puissant que le jeune homme perdit l’équilibre et se retrouva au sol. Ce jour là, il passa le quart d’heure le plus fou de toute sa vie. Oui, il coucha avec elle et oui, c’était sa première fois. Ce fut assez étrange et ils remirent ça plusieurs fois jusqu’au jour où la demoiselle demanda sa mutation dans un autre lycée pour raison personnelle.



Aujourd’hui, Mickey a seize ans. Sa vie est une éternelle routine qui ne lui déplait pas forcément. Son seul et unique ami reste Clyde, du moins, dans l’enceinte de son école et son amour de toujours reste Naomie. Pourtant, elle ne semble toujours pas l’avoir remarqué malgré les années qui ont passé. Clyde et Mickey ne se font plus trop martyrisés par les joueurs de football, disons qu’ils sont devenus complètement transparents et c’est pas plus mal…